24 Hours of Spa: Le compte à rebours !

© Dick Bogaerts

– Dans les coulisses de la plus difficile course GT au monde avec les vainqueurs des Total 24 Hours of Spa. 

Les 1000km du Circuit Paul Ricard, disputés en fin de semaine dernière, ont marqué une étape importante dans le compte à rebours des Total 24 Hours of Spa 2019.

 

Comme le veut la tradition, cette épreuve française était la dernière de la Blancpain GT Series Endurance Cup avant LA course de la saison. Nous sommes désormais à moins de quatre semaines des essais officiels sur le circuit belge (2 et 3 juillet) et à seulement 50 jours de la plus importante course de GT au monde, organisée sur l’un des plus emblématiques tracés du sport automobile mondial.

Créées pour la première fois en 1923, les Total 24 Hours of Spa ont connu un vrai renouveau au cours des deux dernières décennies en devenant une épreuve incontournable que chaque pilote souhaiterait voir inscrite à son palmarès. Les Total 24 Hours of Spa se dérouleront cette année du 25 au 28 juillet. Une course désormais réputée pour la taille de sa grille de départ, ses bagarres en piste et son atmosphère unique hors piste.

Le nombre important de voitures en piste tient une grande part dans le défi auquel les pilotes sont confrontés, avec cette année pas moins de 70 voitures attendues. Bien que quatre catégories différentes soient en compétition, chaque voiture se conforme au même règlement GT3, ce qui signifie que chaque dépassement nécessite un réel savoir-faire et de la patience.

En effet, gagner les Total 24 Hours of Spa sera peut-être plus difficile que cela ne l’a jamais été. Pour comprendre le caractère unique de cette course, nous avons fait appel à des pilotes qui ont tous fait l’expérience de la victoire afin de livrer leurs avis d’experts.

Atmosphère et énergie
L’une des traditions parmi les plus populaires de cette épreuve est la parade du mercredi dans le centre-ville de Spa, suivie d’une séance de dédicaces dans les rues de la ville.

Parmi les pilotes en activité, Maxime Martin connaît les 24 Heures mieux que personne. Fils du quadruple vainqueur Jean-Michel Martin, il a grandi immergé dans cette course qu’il a d’ailleurs remportée lui-même en 2016. Sans surprise, Martin fait partie des pilotes les plus populaires de la parade et l’attend avec impatience chaque année.
« Je n’ai pas beaucoup d’occasions de rouler en Belgique, alors participer aux Total 24 Hours of Spa est toujours spécial », a-t-il déclaré.
« Il y a tellement de monde à la parade (de plus en plus chaque année) et cela fait vraiment partie du spectacle. En tant que pilote belge, tout le monde veut te voir et avoir son autographe. C’est vraiment très intense, mais aussi très agréable. »

Christopher Haase a remporté Spa en 2017 au sein de l’équipe #25 Sainteloc Racing. Le pilote allemand se souvient qu’avant la manifestation, lui et son équipe avaient laissé leur empreinte sur l’Audi R8 LMS.
« Lorsque nous étions dans le centre-ville de Spa pour la séance d’autographes, nous avons décidé de tous signer l’aileron arrière de la voiture, juste parce que nous aimions beaucoup cette épreuve », se souvient Haase. « Quand nous sommes revenus sur le circuit, tous les mécaniciens et tous les autres membres de l’équipe l’ont également signée. »

Quelques jours plus tard, la voiture avec toutes ces signatures a remporté les Total 24 Hours of Spa. Comme le dit Haase: « Je ne pense pas qu’il soit jamais arrivé qu’une voiture signée à l’avance par tous les membres d’une équipe ait ensuite remporté la course! « 

La plus dure au monde
L’épreuve des Total 24 Hours of Spa est une course extrêmement difficile que Markus Winkelhock connaît bien. Le très expérimenté pilote allemand l’a remportée à deux reprises (2014 et 2017) et, en tant que pilote officiel Audi, il participe presque toujours à la bagarre pour la victoire.

« C’est très dur physiquement », déclare Winkelhock. « Nous ne sommes que trois pilotes et il fait habituellement très chaud dans la voiture, ce qui rend cette course très exigeante.
« Pour moi, c’est la plus importante compétition GT. Les écarts sont minces et pour gagner cette course, je comparerais cela à remporter un championnat. »
« Spa est assurément la course de 24 heures la plus difficile au monde, j’en suis convaincu », ajoute Haase. « Sur chaque tour, il faut doubler des voitures qui avancent selon une autre stratégie, ou se battre contre celles qui sont sur la même stratégie que vous. Il n’y a jamais un tour où l’on peut se relâcher un peu, il n’y a aucun droit à l’erreur. »

Jules Gounon, coéquipier de Haase et Winkelhock lors de la victoire en 2017, est du même avis.

« Il faut la bonne voiture, les bons coéquipiers et la bonne équipe, tout doit être parfait », a déclaré le pilote français, qui a depuis rejoint le Bentley Team M-Sport.
« Si l’on observe tout cela de l’extérieur, on réalise que c’est difficile, mais vivre tout cela de l’intérieur, la stratégie, les pneus, le moteur, c’est tout simplement incroyable. Chaque relais revient à rouler sur une course de sprint. Tous les fans avec qui j’échange disent aimer Spa pour cela. « 

Martin, l’expert local, partage le même point de vue sur le caractère compétitif de la course.
« Il y a 70 voitures identiques, de nombreux constructeurs et des pilotes officiels. C’est donc très intense. Il faut se donner à plus de 100% pendant 24 heures, mais c’est pour cela que nous adorons cette course. »

En quête de gloire
Ces dernières années, l’une des plus célèbres victoires à Spa fut celle de 2003. Stéphane Ortelli, qui pilotait une Porsche Freisinger Motorsport, s’est imposé aux côtés de Romain Dumas et Marc Lieb, alors que le fameux ingénieur Norbert Singer faisait aussi partie de l’aventure. Malgré cet équipage de « poids lourds », l’équipe faisait rouler des N-GT. La victoire finale semblait hors de leur portée.

Néanmoins, la Porsche a pris la tête après être restée plus longtemps que ses concurrentes en pneus slicks, permettant à l’équipage de changer rapidement de pneus lorsque la pluie est arrivée. Le coup de génie s’est produit pendant une longue période sous régime de safety-car.

« Norbert Singer a pris la radio et a dit: « Steph, je ne veux pas te voir revenir dans les stands, » se souvient le pilote monégasque. « Fais ce que tu veux, mais essaie de rester en piste. « 

Ortelli est parvenu à rester en piste pendant près de trois heures.
« J’allais assez vite dans Les Combes, puis je coupais le moteur et je descendais jusqu’à Pouhon », explique-t-il, ajoutant qu’il avait également éteint les phares et utilisé l’embrayage pour redémarrer afin de préserver la voiture. « Je roulais pendant quelques kilomètres sans utiliser le moteur et j’étais en sixième pendant le reste du tour. »

La Porsche a conservé la tête et a fait un sans faute durant tout le reste de la course. La machine de ‘la deuxième catégorie’ a finalement triomphé avec huit tours d’avance, décrochant une incroyable victoire.

Winkelhock a vécu une expérience très différente lorsqu’il a remporté les Total 24 Hours of Spa en 2014.

« Laurens (Vanthoor) était malade pendant la course, ce qui signifiait que René (Rast) et moi-même devions terminer les huit dernières heures tous les deux. Physiquement, cela nous a rendu la vie dure, surtout pour René pendant son dernier relais, alors qu’il se battait contre la BMW pour la victoire ».
« Je me souviens qu’après, il était complètement vidé. Il pouvait à peine monter sur le podium. »

Si quelque chose a poussé Rast à dépasser ses limites habituelles, c’est peut-être l’énergie que cette quête de victoire à Spa génère au sein d’une équipe. Haase décrit une sensation similaire lorsqu’en 2017 l’équipe Sainteloc a pris conscience que la victoire était à sa portée.

« C’est arrivé tôt le matin, quand le soleil s’est levé. Nous avions eu des problèmes pendant la nuit qui nous avaient coûté un tour, mais l’équipe avait fait un travail fantastique pour nous remettre dans le match », se souvient le pilote allemand.
« Avec notre stratégie, nous avons réalisé que si nous continuions sur notre lancée, nous pourrions au moins atteindre le Top 3. A partir de ce moment là, nous nous sommes retrouvés parmi les plus rapides.
« C’est un sentiment assez spécial. Une fois qu’un certain cap a été passé et que tout va dans le bon sens, cela donne à l’équipe, aux pilotes et au constructeur l’énergie nécessaire pour se surpasser jusqu’au bout. »

Le sentiment des vainqueurs
La
victoire absolue sur les Total 24 Hours of Spa nécessite un effort surhumain de la part de chaque membre de l’équipage vainqueur. Ainsi, l’émotion qui se dégage du fait de cette première place peut être énorme.

« Le plus étonnant pour moi fut de voir Norbert Singer et Manfred Freisinger (les chefs d’équipe) pleurer à la fin de la course », se souvient le vainqueur de 2003, Ortelli. « Norbert comptait 16 victoires au Mans, mais n’avait jamais gagné Spa et personne ne s’attendait à ce que nous le fassions. C’est mon succès préféré, la plus belle victoire de ma vie. »

Jules Gounon, vainqueur en 2017, a pris la mesure de son exploit en montant sur le podium.
« Je pense que cela a été pour moi la plus forte émotion, car c’était une équipe française (Sainteloc Racing) qui faisait rouler l’Audi. Il y a donc eu La Marseillaise. Rien que de me rappeler de toute l’équipe en train de chanter, j’ai encore les poils des bras qui se dressent. Mes victoires précédentes avaient eu lieu avec des équipes allemandes, donc entendre l’hymne français fut incroyable. »

Maxime Martin ne doute pas de l’importance de sa victoire.
« Gagner les Total 24 Hours of Spa fut la meilleure expérience de ma carrière, encore plus en tant que pilote belge », a déclaré le vainqueur de 2016. « J’avais déjà été proche de cette sensation, alors c’était très important de la vivre vraiment et de se créer ces souvenirs. »

Malgré tout, Martin sait qu’il lui reste encore du travail s’il veut rivaliser avec son célèbre père.
« Je dois encore gagner quelques fois avant de pouvoir égaler les quatre victoires de mon père! Mais cette aventure est spéciale et c’est pourquoi, pour moi, c’est la meilleure course au monde. »

Le mois prochain, Martin fera partie de la petite armée de pilotes espérant décrocher la victoire cette année. Après une journée et une nuit de course, seuls trois d’entre eux pourront faire partie du cercle fermé des vainqueurs des Total 24 Hours of Spa. Ce privilège rend la victoire dans les Ardennes belges si recherchée et ses champions tellement fêtés.

Adelheid Terryn,

PUBLICITÉ