Patron du Rallye du Maroc (9 au 14 Octobre 2019) et Directeur du Dakar (début Janvier 2021), David Castera sera peut-être le seul à voir ‘ses’ épreuves organisées d’ici fin Janvier 2021. Encore faudra-t-il être prêt, avoir tracé les parcours, reconnu les pistes et rédigé les road-book.
Confiné en Andorre où il réside avec sa famille, Castera est en mode télétravail à fond. Pas le choix, les frontières andorranes ouvriront au plus tôt le 6 Juin. Ses équipes travaillent à distance, devant l’ordi en se brûlant les yeux sur Google Earth.
Tracer un Rallye du Maroc n’est pas un exercice compliqué, tant ce pays a été traversé depuis des décennies par des Rallyes, des Raids, des Rallye-Raids et Trophées Tout-Terrain en tout genre.
PLAN A, PLAN B…
Concernant le Dakar, rien à voir : le territoire saoudien découvert l’an passé n’a pas, loin s’en faut, révélé tous ses secrets. Et que dire d’une extension de la trace à des pays limitrophes ? La Jordanie, les Émirats Arabes Unis… « C’est vrai qu’avant la crise du Covid19, nous avions un plan A comme ambitieux, très ambitieux même », confie David Castera. « Mais j’ai vite construit un plan B comme raisonnable », ajoute-t-il dans un sourire. « Nous avons tout travaillé en virtuel, ce qui est un peu bizarre mais nous avons tout : le parcours, les kilomètres, on commence déjà à positionner les points essence pour les ravitaillements motos. Ce parcours ne sera peut-être pas travaillé à 100% de ce que j’aurais voulu, en ce sens que je n’aurais pas le temps de corriger ‘TOUT’ ce qui ne me plaira pas. Je sais qu’il faudra en ‘jeter’ 10% mais pas plus. Donc nous avons vraiment bien avancé. »
Le Dakar 2021 devrait donc se tenir dans les seuls paysages saoudiens. Il y a de la place : le pays est grand comme presque quatre fois la France… On sait tout de même que la seconde partie du Dakar 2020 (beaucoup de sable mais trop facile) avait laissé le Directeur de l’épreuve sur sa faim alors titillons un peu Castera… Il se marre et lâche : « Avec les Émirats Arabes Unis, c’est facile de travailler… Disons que, nous pourrions adapter le plan B… et trouver un plan B prime. »
Le secret du parcours sera levé le 12 Juin lors d’une présentation officielle sous la forme d’un module vidéo de 40 minutes envoyé aux médias et aux concurrents initialement invités à l’Institut du Monde Arabe. « Nous avons perdu un mois sur les annonces mais pas sur le travail », affirme Castera.
RECONNAISSANCES EXPRESS
Le parcours est fait qu’il soit A, B ou B’. Précis et détaillé sur les cartes électroniques, il est, pour l’heure, virtuel. Reste donc à poser la question des reconnaissances du tracé. Elles devaient s’étaler sur les mois d’Avril pour les (pré-reconnaissances), Mai (pour dessiner la trace précise) et Septembre (pour l’écriture du road-book). « Là-dessus, petite prise de tête (avec les équipiers des reconnaissances) » poursuit David Castera. « On se disait : on pourrait peut-être partir dans une semaine ou dans quinze jours… En fait on n’en savait strictement rien et ça changeait tout le temps. Donc, je leur ai dit : départ le 1er Septembre, décision plus réaliste. Et nous compacterons tout à partir de cette date : deux voitures ouvrent la trace, trois jours plus tard deux autres voitures ‘repassent’ sur cette trace et effectuent les éventuelles modifications et trois jours plus tard encore deux autres roulent derrière pour écrire le road-book. Et ce ‘petit train’ échelonné se refile les infos en permanence. J’aurais trois équipes différentes qui feront trois métiers différents à trois jours d’intervalle. » Un mois, peut-être plus, pour tout faire en une seule fois… Pour avoir couvert les reconnaissances depuis 2009, le pari est audacieux, mais réalisable.
ALLÉGER LES DÉPENSES DES CONCURRENTS
L’entretien avec le patron du Dakar s’enchaîne avec bien évidemment la question économique. David Castera est lucide sur le sujet : « Nous avons tablé sur un tiers d’inscriptions en moins, c’est clair ! Mais la période est bizarre… Pour le Rallye du Maroc, j’ai autant d’inscrits chez les Top Teams que l’an passé et beaucoup de concurrents appellent pour un devis. D’autres vont se financer avec des fonds propres. Concernant le Dakar, nous travaillons sur une offre de crise Covid. »
Pas simple pour un concurrent amateur de faire du porte à porte chez des sponsors, bien souvent PME ou TPE forcément affectés par des semaines d’inactivité. Certains d’entre eux n’oseront peut-être même pas…
« Face à une situation économique très difficile, on se doit de faire quelque chose » avance Castera. « Nous allons compresser les vérifications techniques sur une journée et demie à Marseille au lieu de deux jours et demi en Arabie saoudite. Cela fait économiser des jours sur place et donc des nuits d’hôtel, des repas… que ce soit pour les grosses écuries ou les moins argentés. Le billet d’avion pourrait être compris dans l’engagement, nous y réfléchissons. Des boucles seront tracées sur le parcours, au pire, on pourra en ‘squeezer’ une ou deux et réduire le temps de présence des concurrents sur place donc, leur budget de course. Je ne souhaite pas en arriver là mais, nous ferons en sorte qu’ils aient le moins à dépenser. »
En attendant de monter dans une voiture de reconnaissance, David Castera travaille sur toutes les formes possibles de réduction de budget pour les inscriptions au Dakar 2021. L’ouverture est prévue le 15 Juin.
Jean-François Kerckaert,