MissionH24 et son équipe de course H24Racing repartent de la semaine des 90e 24 Heures du Mans après un programme déroulé au fil de cinq journées très intenses. Après sa première participation en course internationale à Imola lors de la manche de la Michelin Le Mans Cup, H24Racing avait décidé de se ‘jeter dans la gueule du Mans’ et de participer à l’intégralité de la Road to Le Mans (deux séances d’essais libres, deux séances de qualification, deux courses de 55 minutes) et de tenter un record de vitesse sur le grand circuit des 24 Heures. De mardi à samedi, retour en détails sur cette séquence qui marque une nouvelle étape pour le programme préparant l’arrivée de la catégorie électrique-hydrogène aux 24 Heures du Mans.
Mardi 7 juin
Depuis 2019, le rituel est immuable : le mardi qui précède les 24 Heures du Mans, l’équipe H24Racing, arrivée la veille au soir avec ses camions dans le paddock de Maison Blanche situé au cœur du circuit, déploie son village technique. La partie la plus visible est un auvent de 170 m2 attaché à la semi-remorque qui transporte les voitures de course et sous lequel s’installent mécaniciens et ingénieurs pour travailler sur les prototypes dans cet espace-atelier.
Cette année une seule voiture y est présente, la H24. La LMPH2G, son aînée, est exposée dans le ‘Village-Bulles ACO H2’, un espace au cœur de la zone publique du Circuit des 24 Heures qui présente la diversité des engagements de l’Automobile Club de l’Ouest en matière de transition énergétique par la solution hydrogène, dont MissionH24 est une composante majeure. Une troisième voiture, le showcar de la LMPH2G, est exposée elle dans le village, au cœur du grand réceptif TotalEnergies.
Dans le même temps, à l’entrée de la voie des stands, la station mobile de ravitaillement en hydrogène TotalEnergies est mise en fonctionnement. La H24, engagée en catégorie ‘Voiture Expérimentale’, y ravitaillera au fil de ses essais libres et qualificatifs, puis des deux courses
Mercredi 8 juin
La journée est placée sous le double signe des premiers essais de la Road to Le Mans, et du record de vitesse auquel H24Racing a décidé de s’attaquer. La tentative a été programmée par la Direction Sportive de l’Automobile Club de l’Ouest, exactement à 13h35, soit dix minutes après la fin de la première séance libre. Le pilote de la H24, Stéphane Richelmi, utilise donc les soixante minutes de cette première prise de contact avec le circuit du Mans pour préparer les réglages du roulage à vitesse maximale. L’équipe technique et les simulations effectuées indiquent que le meilleur secteur du circuit pour y parvenir est la zone comprise entre le Tertre Rouge et la première chicane. Très vite, en raison de la météo qui se dégrade, il est clair que Stéphane n’aura droit ni à un tour de lancement, ni à une seconde tentative. D’autant que des retards ont été pris et que l’autorisation de prendre la piste tarde à arriver. A 13h47, le go tombe enfin à la radio. Il est peut-être déjà trop tard car la pluie commence à tomber. Stéphane s’élance. Il sait qu’il doit en 3,7 km, soit la distance qui sépare la voie des stands de la zone d’enregistrement de la vitesse, mettre ses pneumatiques en température et être à son maximum devant les cellules de chronométrage. À 13h49, au moment où la #24 sort du ‘speed trap’ (littéralement, le ‘piège de vitesse’) dans lequel la vitesse a été enregistrée, les écrans de contrôle du circuit du Mans affichent 290,8 km/h. Sur le compteur de son volant Stéphane Richelmi, lui, lit ‘292,8’. Il a continué à accélérer au- delà de la zone, juste avant le freinage de la première chicane, et la voiture a gagné 2 km/h supplémentaires. Au bord de la piste, les ingénieurs qui surveillent en temps réel le fonctionnement du prototype grâce aux systèmes de télémétrie lisent les mêmes vitesses. Sourires. Soulagement après de longues minutes de tension. Rouler avec des pneus slick, n’ayant pas encore atteint leur température optimale de fonctionnement, sur une piste qui commence à se couvrir d’une pellicule d’humidité, est un exercice réservé aux pilotes de très haut niveau. Mission accomplie.
De retour au paddock de Maison Blanche, la réunion technique passe rapidement sur le record. Tout s’est bien déroulé, la voiture a dépassé les 290 km/h dans des conditions peu favorables, tout le monde est content. MissionH24 vient, à nouveau, d’écrire avec ce record une nouvelle page de l’histoire du sport automobile. Mais il faut maintenant se détacher de cette performance et revenir à une réalité plus immédiate : préparer les qualifications et les deux courses de 55 minutes de la Road To Le Mans. Un objectif chasse l’autre. Ainsi va MissionH24 depuis son lancement en 2018.
L’après-midi, la seconde séance d’essais libres est donc consacrée à la préparation des qualifications et à des essais, réalisés à la demande de Michelin. Le manufacturier a préparé un nouveau pneumatique, le ’53’, et souhaite un retour de ressenti de Stéphane Richelmi et de l’équipe H24Racing sur son comportement. ’53’, c’est le pourcentage de matériaux recyclés et durables utilisés dans ce pneu à hautes performances. Après trois tours, Stéphane et les ingénieurs font un rapport très positif à Michelin. Leur ’53’ va pouvoir bientôt remplacer le ‘TMD 46’ (pour Taux de Matériaux Durables 46% » qui équipait jusqu’alors la voiture. Ci-dessous Stéphane Richelmi concentré dans son cockpit avant de s’élancer en piste. Image Copyright MissionH24_Paul ‘PHD’ Davidson_The Pit Stop Magazine.
Jeudi 9 juin
H24Racing est confronté à plusieurs nouveaux défis en piste : à l’heure du déjeuner pour les spectateurs, réaliser deux séances de qualifications de vingt minutes, espacées de seulement quinze minutes : de 12h10 à 12h30, puis de 12h45 à 13h05. Et, le soir à 18h30, disputer la première des deux courses de la Road to Le Mans.
Les essais qualificatifs présentent une double difficulté : ils doivent être réalisés dans une fenêtre très réduite, laissant peu de temps pour effectuer des changements de réglages importants sur la voiture. Et chaque séance elle-même ne permet par la moindre erreur. En effet si, sur un circuit
‘normal’, on peut réaliser en vingt minutes plusieurs tentatives contre le chronomètre, les 13,626 km du circuit du Mans restreignent l’exercice à un seul tour rapide, deux au maximum s’ils sont enchaînés, par séance. L’équipe décide donc d’utiliser la première qualification pour établir un temps de base, puis de permettre à Stéphane Richelmi de se libérer dans la seconde. Ce programme est respecté à la lettre. La première qualification est une séance de travail. La seconde est destinée à la prise de risque -calculé. Et à 13h05, malgré une séquence émaillée de nombreux drapeaux jaunes, Stéphane réalise un très beau 4’12’’434/1000èmes.
A 18h30, H24Racing aborde la course avec comme objectif, non pas la performance absolue, mais un programme de travail sur des stratégies de ravitaillements. Là-encore, mission accomplie. La H24 fait sa course et passe à deux reprises par les stands pour ravitailler à la station hydrogène TotalEnergies.Ci-dessous la H24 lors d’un arrêt ravitaillement en hydrogène à la station mobile TotalEnergies spécialement conçue pour le programme MissionH24. Image Copyright MissionH24_Paul « PHD » Davidson_The Pit Stop Magazine.
Vendredi 10 juin
La journée du vendredi est traditionnellement une parenthèse dans la semaine de course. Elle est réservée aux démonstrations. MissionH24 a réservé des créneaux pour offrir des baptêmes de piste à quelques invités à bord de la LMPH2G, extraite pour l’occasion du ‘Village-Bulles ACO’.
‘H2’. Après son tour du circuit des 24 Heures, chaque invité redescend du prototype avec des images plein la tête et gardera longtemps en tête le souvenir des sensations que vient de lui procurer Stéphane Richelmi. Le dernier des invités est le capitaine de l’Energy Observer, Victorien Erussard. Il est venu vivre la semaine des 90ème 24 Heures du Mans en immersion au sein de l’équipe H24Racing et ce tour dans le baquet de gauche est pour lui un moment très intense. Lorsqu’il s’extrait de la voiture, les yeux de ce marin au long-cours, skipper d’exception, brillent d’une envie de repartir pour quelques tours de plus !
Le Président de GreenGT, Christophe Ricard, n’est pas au bord de la piste avec les invités pour les baptêmes. Co-Président du programme MissionH24, il a été invité l’autre co-Président, Pierre Fillon, Président de l’Automobile Club de l’Ouest, à la traditionnelle conférence que donne celui-ci le vendredi qui précède les 24 Heures. Convié sur scène, Christophe Ricard résume en compagnie de Pierre Fillon les quatre premières années d’existence de MissionH24 et les fantastiques avancées réalisées par le programme au service de la mobilité électrique-hydrogène et le travail en cours pour que, à horizon 2025, les 24 Heures du Mans accueillent une catégorie réservée aux véhicules à propulsion hydrogène. Ci-dessous Victorien Erussard (à g.), qui a eu le privilège d’un tour du circuit du Mans dans le baquet passager de la LMPH2G, pilotée par Stéphane Richelmi. Image Copyright MissionH24_Paul ‘PHD’ Davidson_The Pit Stop Magazine.
Samedi 11 juin
Deux séquences radicalement différentes sont au menu de MissionH24 en ce samedi, jour de départ des 90e 24 Heures du Mans : de 11h20 à 12h15, la seconde course de la Road to Le Mans ; puis, à 15h42, le Tour d’Honneur de la H24, seule en piste, exactement 18 minutes avant que ne s’élancent les concurrents des 24 Heures.
Pour la course, Stéphane Richelmi, les ingénieurs de H24Racing et les ingénieurs de TotalEnergies, ont décidé d’effectuer des tests d’arrêts de ravitaillement en mode « splash ». C’est-à-dire des arrêts très courts, lors desquels ont ravitaille très brièvement la voiture pour laisser repartir sans qu’elle ait perdu trop de temps. Au fil de ses neuf tours de course, Stéphane Richelmi s’arrête donc à trois reprises par la station TotalEnergies avant de passer sous le drapeau à damier. Ainsi prend fin la semaine de compétition de l’équipe de course du programme MissionH24 sur le grand circuit du Mans. Le bilan de cette semaine de la Road to Le Mans se résume en quelques chiffres : 43 tours du grand circuit du Mans, soit 585,918 km couverts à cadence d’essais et de course, et 10 ravitaillements effectués. Jamais un prototype de MissionH24 n’avait réalisé autant de kilomètres et de ravitaillements en si peu de jours (plus du double de la distance couverte à Imola).
Moins de deux heures plus tard, tous les membres de l’équipe H24Racing accompagnent la H24 qui vient lentement se positionner en haut de la grille de départ de la 90e édition des 24 Heures du Mans. Tous derrière et lui devant, le prototype de course du programme MissionH24 accueille pendant plus de 90 minutes les partenaires mais aussi les membres des équipages qui sont installés en épis derrière lui, prêts à s’élancer pour la course.
A 15h42 précises, Stéphane Richelmi actionne la pile à combustible à hydrogène de la H24 pour un Tour d’Honneur qui achève en beauté la semaine de MissionH24 au Mans. Ci-dessous, autour de la H24 sur la grille de départ des 24 Heures du Mans : Richard Mille, président de la marque horlogère qui porte son nom, Christophe Ricard, Président de GreenGT et co-Président de MissionH24, Christian Kopp, Président Directeur Général de la Division Clean Energy Systems de Plastic Omnium et, de l’autre côté de la voiture, Florent Menegaux, Président du Groupe Michelin, Philippe Rosier, Directeur Général de Symbio, Patrick Pouyanné, Président Directeur Général du Groupe TotalEnergies, Pierre Fillon, Président de l’Automobile Club de l’Ouest et co-Président de MissionH24, et Peter Kütemann, Président du Groupe Dietsmann. Devant la H24, ses deux pilotes : Norman Nato et Stéphane Richelmi. Image Copyright MissionH24_Paul ‘PHD’ Davidson_The Pit Stop Magazine.
Carole Capitaine & François Granet,
