Johnny, le Dakar et les potes !

Johnny, André Dessoude et Stéphane Peterhansel

En 2002, l’icône française s’était engagée pour rallier Dakar depuis Arras. Son copilote René Metge et son directeur d’écurie André Dessoude racontent. 

Arras, à la fin du mois de décembre 2001. Une foule compacte est massée dans le centre-ville, départ du 24ème Dakar qui doit mener les concurrents jusqu’à Dakar. André Dessoude, patron de l’écurie qui porte son nom, jette un regard depuis la fenêtre d’un hôtel. Il est anxieux.

« On ne passera jamais à travers une telle foule », souffle-t-il à l’un de ses pilotes… un certain Johnny Hallyday. Plusieurs gardes du corps sont appelés en renfort, quatre autres, les siens, sont déjà présents. L’équipe se décide enfin à traverser la place à pied, s’offrant un redouté et gigantesque bain de foule. « Les gens étaient hystériques mais Johnny restait calme », explique André Dessoude. « Ça donnait le ton de l’aventure que nouas allions vivre ! »

Le coup de fil à Jean Todt , le champagne à Ouarzazate
Cette aventure avait débuté quelques mois plus tôt par un coup de fil. Johnny, qui voulait acquérir une Ferrari, appelle Jean Todt, alors directeur de l’écurie de F1 où brille Michael Schumacher. « Je veux faire le Dakar », lui confie également le chanteur, qui avait été séduit par la discipline un an plus tôt en participant au rallye de Tunisie avec son beau-père André Bourdou. « Johnny était un peu jaloux de son fils, David, qui était un super pilote sur circuit » assure Jojo Groine qui lui avait préparé une Mercedes.

Jean Todt conseille alors à Johnny de se rapprocher d’André Dessoude, un habitué du rallye-raid qui n’a manqué aucun Dakar depuis 1982. « Le 22 mai, le jour de mes 61 ans, je vois Johnny débouler à Ouarzazate (Maroc) avec deux bouteilles de champagne », se souvient André Dessoude. « Je n’en croyais pas mes yeux : il voulait fêter mon anniversaire. C’était la première fois que je le voyais. »

« J’ai été frappé par sa simplicité »
Dans les semaines qui suivent, le chanteur demande à Gérard Holtz les cassettes vidéo des éditions précédentes et André Dessoude s’occupe de lui fournir un véhicule, un 4×4 Nissan, et lui conseille un copilote. « Il fallait quelqu’un pour le guider, le canaliser, pour avoir confiance. Ce ne pouvait être que René Metge », assure le patron d’écurie.

Pilote très expérimenté depuis 1975, engagé depuis 1981 dans ce rallye-raid qu’il remporte à trois reprises, René Metge connaît toutes les ficelles de la course. « Avec Johnny, ça a collé tout de suite, se souvient le copilote de circonstance. J’ai été frappé par sa simplicité et son humilité, il ne pouvait pas y avoir de problème dans la voiture ! »

Les premiers jours de course sont difficiles : les Français se massent au bord des routes pour apercevoir la star. « Aux différents péages jusqu’à Perpignan, il y avait presque des émeutes », se souvient René Metge. Même au Maroc, jusqu’à Tam-Tam, de nombreux Français suivaient la star en camping-car. « Ça m’énervait, je devais être son garde du corps en permanence », poursuit René Metge, par ailleurs beau-frère de Coluche et prévenu des contraintes du star-système. « Les gens étaient vraiment sans gêne ! » Quelques jours plus tard, ce sont les concurrents qui agacent René. « À chaque bivouac, certains arrivaient avec une bouteille pour trinquer avec lui. Johnny n’avait même pas le temps de se reposer ! »

Une nuit à la belle étoile
Malgré l’effervescence des campements, il reste à René ses souvenirs de partage simple et cette complicité nouée au fil des étapes. « Une nuit, on ne voyait rien au point de nous arrêter en fin de spéciale au milieu des dunes. J’ai installé la tente et nous avons dormi à la belle étoile. Johnny ne s’est jamais plaint », confie le copilote. « Je suis nostalgique de cette nuit dans les dunes », a expliqué le chanteur quelques années plus tard dans une interview.

Du Dakar de la star, les Français retiendront surtout une image captée par un caméraman qui fera les joies des bêtisiers. Johnny se confie, fenêtre ouverte, à André Dessoude : « Tu te rends compte que si on n’avait pas perdu une heure et quart, on serait là depuis une heure et quart ? » « C’est une phrase comme on en entend tous les jours en rallye, mais c’est Johnny. La séquence a été diffusée des dizaines de fois », sourit André Dessoude. « On en a beaucoup ri après », et on en riait encore !

Une soirée en or
Ce n’est pas son seul coup d’éclat à la télévision. Interviewé par Gérard Holtz à l’arrivée à Dakar, Johnny Hallyday, qui vient de terminer 49ème de l’épreuve, jette son paquet de cigarettes par-dessus son épaule. « Il fumait tout le temps », rappelle le présentateur. « Même à bord de la voiture ! Je lui disais : tu as 100 litres d’essence derrière toi, fais attention ! Lors de la journée de repos, il avait été pris d’une quinte de toux et m’avait promis d’arrêter s’il ralliait Dakar. »
Promesse tenue, donc, devant les caméras. « Sauf que, l’émission terminée, Johnny a couru reprendre son paquet de cigarettes pour s’en griller une », s’amuse René Metge.

Une poignée d’heures plus tard, la star est furieuse. Il souhaite faire la fête avec toute l’équipe mais il ne peut pas. « Nous étions invités à une réception organisée par le président Wade, dont la fille faisait également le Dakar », rappelle André Dessoude. « Johnny était vraiment énervé », souligne René Metge. Il n’est pas resté longtemps au palais » puisque il rejoignait le Restaurant Le Lagon pour dîner avec André Desspoude, son asssistante Géraldine Dehayes et l’Attachée de presse terrain, Marie-France Estenave.

Une autre soirée se dessinait, quelques semaines plus tard, toute l’équipe (une soixantaine de personnes) se retrouvait dans son restaurant, le Balzac, près des Champs-Élysées. Les tables ont été poussées, une scène improvisée et tous les membres du groupe de Johnny ont revêtus les tee-shirts du Team Dessoude. Au micro, la star retrouve son costume de scène et improvise un concert. Avec un malin plaisir, il modifie certaines paroles pour remercier René, André et l’équipe Nissan-Dessoude. « C’était très fort », explique son copilote. « Qu’une icône de la chanson puisse avoir autant de petites attentions, ça m’a marqué à vie. »
« Cette soirée, c’était l’un des plus grands moments de ma vie », conclut André Dessoude.

Le POINT.FR

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