Ferrari remporte la 92ème édition des 24 Heures du Mans

Ferrari décroche un 11e succès aux 24 Heures du Mans, le second de rang pour les 499P après la victoire de l’édition du Centenaire. Antonio Fuoco, Miguel Molina et Nicklas Nielsen sur la 499P #50 rejoignent ainsi au palmarès de la course leurs équipiers de la #51 (Alessandro Pier Guidi/James Calado/Antonio Giovinazzi) vainqueurs en 2023.

Après une édition marquée par la pluie, qui est venue chambouler l’épreuve à plusieurs reprises, c’est Ferrari qui s’impose. à nouveau. Retour sur cette version 2024 inédite qui a vu 23 hypercars batailler en piste.
La 499P assied sa légende

Une surprenante Ferrari jaune
En tant que vainqueur sortant, Ferrari était évidemment attendu, et on se doutait que les 499P allaient se battre aux avant-postes de cette 92e édition. Toutefois, la plus surveillée du clan italien n’était probablement pas la #83 de Robert Kubica/Robert Shwartzman/Yifei Ye. Et pourtant.

Dès le départ, les #50 et #51 sont les rapides. Nicklas Nielsen, sur la #50, prend la tête dès le premier tour. Il ne laisse pas à Laurens Vanthoor (Porsche 963 #6 Porsche Penske Motorsport) le plaisir d’ouvrir la piste. Dans la foulée, c’est Antonio Giovinazzi (Ferrari 499P #51) qui l’imite et passe le pilote belge. Le duo de Ferrari 499P à la robe rouge est aux commandes après seulement 13 minutes de course. Un peu plus loin, Robert Kubica (Ferrari 499P #83), parti 12e, pointe déjà à la cinquième place, à la faveur de premiers tours très incisifs.

Nous n’assistons pour autant pas à un récital des prototypes Ferrari, la météo capricieuse venant – une première fois – chambouler le scénario parfait qu’avaient imaginé les tifosis.

Aux environs de 17 h 40, la pluie fait sa première apparition pendant la course, obligeant les équipes à se positionner rapidement. Plusieurs hypercars chaussent, de manière très précoce, des pneumatiques pluie. C’est le cas chez Ferrari sur la #51, chez Porsche sur la #4 et chez Toyota sur la #7. Partie de l’Hyperpole, la 963 #6 emmenée par André Lotterer (qui relaie très tôt Laurens Vanthoor) fait aussi ce choix – qui se révèle ne pas être le bon. Celui qui survole la concurrence, c’est Robert Kubica. Sa 499P jaune est la seule à être équipée slicks, avec le composé le plus tendre. Dès lors, et avec une piste qui devient de plus en plus sèche, Robert Shwartzman le relaie et s’applique. Il s’échappe. Il construit son avance, seconde par seconde.

Une alerte sérieuse survient toutefois samedi soir. Peu avant 22 heures, la pluie est de retour et on se prépare dans les stands pour l’affronter à nouveau. Une fois encore, la stratégie est la bonne sur la #83. On choisit rapidement les pneus pour chaussée humide – comme sur la 963 #5 – et, avec une pluie persistante, les secondes se perdent par poignées pour les poursuivants : la Ferrari #83 tourne 30’’ plus vite au tour que ses opposants restés en slicks ! Mais tout bascule à 22 h 37. Robert Kubica revient à pleine vitesse sur la BMW M Hybrid V8 #15 de Dries Vanthoor. Ce dernier ne veut pas se faire prendre un tour, car rester dans la même boucle que le leader peut s’avérer décisif en cas de sortie des voitures de sécurité. Le contact envoie la machine allemande dans le mur. Elle est si fortement endommagée que Dries Vanthoor doit mettre pied à terre. Jugé coupable d’avoir tassé ce dernier, Robert Kubica écope de 30 secondes de pénalité lors de son arrêt suivant. Cette punition, purgée à 00 h 30, fait reculer l’hypercar jaune. Jamais elle ne sera revue en haut d’une feuille de classement (à 12 heures le dimanche, Yifei Ye l’immobilise devant son stand avant qu’elle ne soit rentrée, abandon).

L’attente
Se dessine une bataille à trois entre Porsche Penske Motorsport, Toyota Gazoo Racing et Ferrari AF Corse.

On ne retrouve pas l’unique Isotta Fraschini, qui connaît une très belle première participation, mais ne peut se battre devant. Dans le clan Lamborghini, les SC63 sont encore là, fiables, mais loin. BMW non plus ne peut pas fêter de la meilleure manière le 25e anniversaire de la victoire de la V12 LMR. La M Hybrid V8 ​​#15 est éliminée suite au contact avec la Ferrari 499P #83. La #20, elle, était déjà hors séquence dès le début de l’épreuve, avec plusieurs problèmes techniques pour ce grand retour.

Dans la nuit, on ne compte malheureusement plus de forces françaises capables de gagner, Alpine ayant rencontré des difficultés en début de soirée avec ses moteurs, et Peugeot ayant quitté le tour de tête après seulement 2h45 d’épreuve.

Des hypercars encore dans le coup (elles sont encore une dizaine à minuit), c’est la Toyota GR010 Hybrid #8 Toyota Gazoo Racing de Sébastien Buemi/Brendon Hartley/Ryo Hirakawa qui traverse la nuit devant. Sur toutes les feuilles de chronométrage officielles, de 1 heure à 9 heures du matin, la machine nippone est au top. Comme dans la plus pure tradition des 24 Heures du Mans, ce cavalier nocturne permet-il à Toyota de construire sa victoire ? Non. La lecture brute des résultats est un leurre. Car cette édition 2024 est imprévisible.

En réalité, le trio Ferrari-Porsche-Toyota se toise, s’observe, se défie. Mais les pilotes ne se battent pas. Les conditions météorologiques effroyables poussent la direction de course à faire sortir les voitures de sécurité pour une durée de 4 h 26. Le Mans est en pause. Pour mieux repartir.

Les pilotes sont comme des lions en cage et espèrent des conditions meilleures pour partir en chasse. Impossible de dépasser, impossible de faire parler ses arguments. Il faut être appliqué, essayer de bien économiser le carburant et ne pas faire d’erreur dans les stands. Certains pilotes bavardent avec leur ingénieur à la radio, pour vaincre l’ennui et la monotonie. D’autres apprécient ce calme, qui n’est que temporaire. Car le sprint va redémarrer.

L’emballage final
À sept heures du but, 11 voitures sont encore dans le tour de tête et peuvent prétendre à la victoire. Il ne pleut plus : la bataille est intense au sein de ce peloton, avec des affrontements multiples. On se rend coup pour coup entre hypercars.

Toutes les marques ne répondent pas présentes. Cadillac perd deux voitures. Fuite d’huile sur la Cadillac V-Series.R #3 (Sébastien Bourdais/Renger van der Zande/Scott Dixon) et accident spectaculaire pour Pipo Derani sur la Cadillac V-Series.R #311.

Porsche aussi souffre. La 963 #4 percute le mur de pneus à Indianapolis (avec Felipe Nasr). Au rythme, les 963 #5 et #6 semblent moins à l’aise. Les pilotes ne parviennent pas à hausser leur niveau pour chercher les dixièmes qui font la différence.

Le rythme s’accélère à l’entame des quatre dernières heures. Longtemps c’est le 46e tour d’Antonio Fuoco en 3’29’’208 qui est resté le meilleur temps. Mais à 12 h 15, la marque tombe. Alex Palou (Cadillac V-Series.R #2 Cadillac Racing) impressionne : 3’28’’938 au 253e tour – avant que Kamui Kobayashi (Toyota GR010 Hybrid #7) n’améliore en 3’28’’756 au passage suivant.

Un peu avant 14 heures, la pluie revient. Doucement, d’abord, puis de manière plus intense dans tout le premier secteur, de la ligne droite jusqu’à la chicane Daytona. Certains craquent. Brendon Hartley part à la faute à Mulsanne avec la Toyota GR010 Hybrid #8 suite à un contact avec Alessandro Pier Guidi (Ferrari 499P #51). Un doublé Ferrari, la #50 devant la #51, se dessine. Finalement, une Toyota, la GR010 Hybrid #7 de José María López/Kamui Kobayashi/Nyck de Vries parvient à s’intercaler. 14 »221 d’écart sur la ligne !

LMP2 : United retrouve la victoire
Ouverte, imprévisible, la catégorie LMP2 a de nouveau été animée, avec plusieurs équipes ayant joué un rôle tout au long des 24 heures. Au départ, c’est l’Hyperpoleman Louis Delétraz sur son Oreca 07-Gibson #14 d’AO by TF qui se montre. Mais, au fil des relais de ses équipiers et selon les stratégies des autres équipes, la hiérarchie change. La #10 Vector Sport (Ryan Cullen/Patrick Pilet/Stéphane Richelmi) et la #183 AF Corse (François Perrodo/Ben Barnicoat/Nicolas Varrone) sont en pointe.

Déjà heureux et victorieux en Sarthe, Ben Keating connaît un premier relai compliqué et sort à plusieurs reprises. Associé à Filipe Albuquerque et Ben Hanley, il compose un équipage très en vue.

Le dimanche, ce sont les équipes Inter Europol Competition (avec la #34) et Cool Racing (avec la #37) qui se distinguent. Mais au damier, et pour la première fois depuis 2020, United Autosports renoue avec le succès.

Porsche inaugure la catégorie LMGT3
Avec neuf marques représentées au départ de la première édition accueillant des voitures répondant au règlement LMGT3, le résultat était difficile à prédire. Plusieurs constructeurs ont tenu la tête au long de l’épreuve. McLaren, avec l’Hyperpole de la 720S LMGT3 Evo2 #70 Inception Racing de Brendan Iribe/Ollie Millroy/Frederik Schandorff pouvait répéter l’histoire (la victoire au général de McLaren en 1995 a été décrochée à l’issue d’une édition marquée par la pluie). Les #59 et #95 de l’équipe United Autosports (dont les numéros sont des clins d’œil directs à cette épopée) n’ont pas suffi.

Lexus a été très en vue, avec les RC F LMGT3 #78 et #87 Akkodis ASP Team. Une première encourageante pour la plus ancienne des GT3 au départ, dont le remplacement est prévu en 2026.

On a cru à l’exploit de Valentino Rossi, engagé sur la BMW M4 GT3 #46. Le multiple champion de Moto GP a mené la course, bien aidé par le travail de Maxime Martin, impeccable au départ. Mais Ahmad Al Harthy a perdu le contrôle de la bavaroise en sortie de stands, et a trop endommagé la voiture pour continuer. La #31 est la seule rescapée du clan WRT.

Les grands débuts des Ford Mustang ont été remarqués, Proton Competition exploitant parfaitement des voitures qu’il connaît encore peu. Il reviendra, on peut en être certain, pour gagner.

L’équipe Iron Dames a fait preuve d’une belle régularité, menant la course par moments. Mais c’est à Porsche que revient cette 92ème édition. La #92 (comme un symbole) tenait la course mais a rencontré des problèmes de boîte de vitesses. La #91 a pris le relai, avec Yasser Shahin/Morris Schuring/Richard Lietz. Le rythme imposé pendant l’épreuve a repoussé l’opposition à un tour (à l’exception de la BMW M4 GT3 #31).

Top 5 du classement général
1. Ferrari 499P #50 Ferrari AF Corse – Antonio Fuoco / Miguel Molina / Nicklas Nielsen – 311 tours
2. Toyota GR010 Hybrid #7 Toyota Gazoo Racing – José María López / Kamui Kobayashi / Nyck de Vries – + 14’’221
3. Ferrari 499P #51 Ferrari AF Corse – Alessandro Pier Guidi / James Calado / Antonio Giovinazzi – + 36’’730
4. Porsche 963 #6 Porsche Penske Motorsport – Kévin Estre / André Lotterer / Laurens Vanthoor – + 37’’897
5. Toyota GR010 Hybrid #8 Toyota Gazoo Racing – Sébastien Buemi / Brendon Hartley / Ryo Hirakawa – + 1’02’’824…

Les vainqueurs des autres catégories :
LMP2 : Oreca 07-Gibson #22 United Autosports – Oliver Jarvis / Bijoy Garg / Nolan Siegel – 296 tours
LMGT3 : Porsche 911 GT3 R LMGT3 #91 Manthey EMA – Yasser Shahin / Morris Schuring / Richard Lietz – 280 tours

Les abandons :
Ferrari 296 LMGT3 #54 Vista AF Corse – Thomas Flohr / Francesco Castellacci / Davide Rigon – Sortie de piste
Alpine A424 #35 Alpine Endurance Team – Paul-Loup Chatin / Ferdinand Habsburg-Lothringen / Charles Milesi – Moteur cassé
Oreca 07-Gibson #9 Proton Competition – Jonas Ried / Maceo Capietto / Bent Viscaal
Alpine A424 #36 Alpine Endurance Team – Nicolas Lapierre / Mick Schumacher / Matthieu Vaxivière – Moteur cassé
BMW M Hybrid V8 #15 BMW M Team WRT – Dries Vanthoor / Raffaele Marciello / Marco Wittmann – Accrochage
BMW M4 LMGT3 #46 Team WRT – Ahmad Al Harthy / Valentino Rossi / Maxime Martin – Sortie de piste
Oreca 07-Gibson #30 Duqueine Team – John Falb / James Allen / Jean-Baptiste Simmenauer (LMP2 Pro/Am) – Casse moteur
Ferrari 296 LMGT3 #66 JMW Motorsport – Giacomo Petrobelli / Larry ten Voorde / Salih Yoluc
Oreca 07-Gibson #45 Crowdstrike Racing by APR – George Kurtz / Colin Braun / Nicky Catsburg (LMP2 Pro/Am)
Aston Martin Vantage AMR LMGT3 #27 Heart Of Racing – Ian James / Daniel Mancinelli / Alex Riberas – Sortie de piste
Porsche 963 #4 Porsche Penske Motorsport – Mathieu Jaminet / Felipe Nasr / Nick Tandy – Sortie de piste
McLaren 720S LMGT3 Evo #95 United Autosports – Hiroshi Hamaguchi / Nicolas Pino / Marino Sato
McLaren 720S LMGT3 Evo #59 United Autosports – James Cottingham / Nicolas Costa / Grégoire Saucy
Cadillac V-Series.R #3 Cadillac Racing – Sébastien Bourdais / Renger van der Zande / Scott Dixon – Casse moteur
Ferrari 499P #83 AF Corse – Robert Kubica / Robert Shwartzman / Yifei Ye – Problème du système hybride

Meilleur tour en course : Kamui Kobayashi sur la Toyota #7, 3’28’’756 (254ème tour).

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